Eté 1935
Extraits de François Jacob, La Statue Intérieure, Éditions Odile Jacob, 1987
Hiver 1935-1936
Eté 1936
Hiver 1936-1937
Eté 1937
Odile – Lettre à Hélène du15 août 1937
Le séjour ici s’annonce gai. Il y a un monde fou. Doudy est là avec son oncle André MEYER.[1] François JACOB[2], le HERTZ brun[3], est là aussi, avec une bande d’amis. Il y a des enfants très gentils quoique un peu jeunets : Jacques et Lises LEON-BLOCH. La famille Ado DREYFUS est ici au complet, y compris Miss Joan. Bref (style VIENOT), les connaissances ne manquent pas.
Je ne m’ennuie pas le moins du monde. C’est très amusant d’être la nièce du maire. Il m’emmène partout. Je suis au mieux avec l’adjoint. Les commerçants sont doux comme le miel (réminiscence « mellito Cicerone » !). Tous les matins, je vais faire un brin de causette avec le cordonnier.
Jeudi soir, j’ai été à un grand dîner chez les beaux-parents de ma tante. Ce sont des milliardaires[4]qui possèdent une propriété mirifique. J’étais horriblement intimidée. Les maîtres d’hôtel engrande livrée me troublaient infiniment. Le service était tellement compliqué que je me suis complètement embrouillée. J’ai mis la salade dans l’assiette à pain, le pain sur la nappe et le vin rouge dans le verre à cidre. Pour comble de malheur, ma serviette amidonnée s’en allait toutes les cinq minutes faire un petit tour sous la table. Au prix d’efforts surhumains, en me disloquant entièrement, je parvins à la ramener et même à la conserver, en la bordant soigneusement sous mes cuisses. Dernière catastrophe : j’étais assise à côté de François JACOB, qui n’arrêtait pas de murmurer des pitreries. Je piquais des fou-rires et c’était très désagréable, surtout quand je buvais de l’eau (tu en sais quelque chose).
[1] Demi-frère d’Edmée HIRSCHMAN (sa mère, Lucie CERF, mère d’Edmée et veuve à 22 ans d’Edmond HIRSCHMANN, s’étant remarié avec Oscar Jules MEYER). Edmée, mariée avec Edouard WEILL, grand-oncle maternel d’Odile (mort en 1918), a eu deux fils Edouard (Doudy) et Michel dont Odile est proche, et dont André MEYER est donc l’oncle. André MEYER, fait ses armes dans la banque BAUR et Cie créée par le grand-père maternel d’Odile, puis rejoint LAZARD FRERES. Il deviendra, à la tête de LAZARD FRERES New York, l’un des plus grands financiers du XXème siècle
[2] Fils de Simon JACOB et Thérèse FRANCK. Il obtiendra le Prix Nobel de Médecine en 1965, en même temps que André LWOFF et Jacques MONOD (partenaire de tennis d’Hélène à Aubergenville)
[3] François JACOB ressemblait à Claude HERTZ, en brun.
[4] Le père de Raymond LINDON, Alfred LINDON (né Abner LINDENBAUM ; c. 1867 – 1948) était un bijoutier polonais issu d’un milieu juif pauvre qui est devenu un expert des perles. Il s’est marié avec Fernande CITROEN (la sœur du constructeur André CITROEN) et a construit une importante collection d’art moderne qui a été pillée par les nazis dans le Paris occupé pendant la Seconde Guerre mondiale https://fr.qaz.wiki/wiki/Alfred_Lindon
Lettre à Hélène du 24 août 1937
Enveloppe adressée à Mademoiselle H. BERR, « Le Vivier », Aubergenville (Seine-et-Oise)
Dimanche soir
Lettre à Hélène du 24 août 1937
Enveloppe adressée à Mademoiselle H. BERR, « Le Vivier », Aubergenville (Seine-et-Oise)
Dimanche soir
« Ma chère enfant
Que voilà une gentille lettre, vive, alerte, bien tournée, où je vous retrouve toute avec votre grâce primesautière » Il est vrai que l’esprit en est un peu macabre. Mais je me garde bien de suivre vos conseils …. Il n’y a que des joyeuses pensées dans ma tête écervelée Loin de moi les préceptes du gueux Montaigne ! Je veux m’amuser, je veux rire et danser. Zut pour le reste !
Ier Chapitre
Ci-joint mon emploi du temps. Vous verrez qu’il n’a rien d’extraordinaire. Mais dans l’ensemble il est bourré de menus incidents qui en font le charme.
8H ½ Petit déjeuner en famille. Très gai
9H Je fais mon lit en m’accompagnant de forces jurons (tu connais cela). Interruption : course précipitée vers l’extrémité du couloir, accomplissement de la tâche quotidienne
10H Picksy One (Annette) et Picksy Two (Odile) font leur entrée au tennis. Elles sont accueillis par le HERTZ brun et de nombreux amis (voir plus bas)
12H Après avoir bien sué et soufflé, on se plonge avec délice dans l’onde amère. Plus de bonnet de bain. Vive les permanentes !Mes cheveux se jouent dans les vagues, comme la tignasse ondoyante d’une sirène
12H ½ Cocktail au casino. Potins
1H ¼ Déjeuner ultra-gai suivi de bonbons ultra délicieux
2H ½ Picksy One (Annette) et Picksy Two (Odile) font leur entrée au tennis. Elles sont accueillis par le HERTZ brun et de nombreux amis (voir plus bas). Championnats. Béranger arbitre.
Le HERTZ brun a beaucoup de chances de gagner.
Partie de chat-perché sur les pelouses qui entourent le tennis. Potins
Combat de coq entre Béranger et le HERTZ brun.
5H Goûter en bande chez LECOEUR, pâtisserie idéale
5H ½ Petite promenade à bicyclette
7H On fait les cent pas sur la terrasse du casino. Potins. Escarmouches avec le HERTZ brun
8H Dîner. Le maire nous raconte des histoires à se rouler par terre
9H Promenade sur la digue en compagnie de Picksy One. Quelquefois : Tête à tête nocturne avec le HERTZ brun Conversation sérieuse et élevée. Tenue impeccable
10H ½ Rrrrr….Rrrrr….Rrrrr. Des ronflements sonores ébranlent la maison. Béranger fait des rêves d’or peuplés de HERTZ bruns
Et maintenant, passons au chapitre suivant.
IIe Chapitre
Les Amis
Ils sont nombreux, mais de qualités variées. Un seul mérite vraiment le titre d’ami. Pardon ? Vous disiez ?…. On ne peut mieux deviner. Vous l’avez nommé.
Gérard LEVY et Michel BLOCH sont deux gueux qui ortent leur nom à merveille. Intelligents d’ailleurs, et fort bons joueurs de tennis, ils sont malheureusement trop âge-ingrateux. Marie Claire ISCHWAL est une mijaurée qux lèvres de cerise, aux cils de poupée. Elle a quinze ans mais elle en paraît trente. Elle est de plus fort empressée auprès du HERTZ brun. Ah mais ! Ah mais !
Tout doux ! Ne vous y frottez pas.
Doudy WEILL est un bon garçon. Il serait beaucoup plus sympathique s’il était un peu moins bonnet de nuit. Liliane de Rooy est une fille charmante. Elle n’a qu’un défaut : celui d’être trop familière avec certaine personne de ma connaissance.
Gladys MEYER est inodore, incolore et sans saveur. Elle trouve pourtant moyent de LUI faire de l’œil.
Picksy One dite Annette DREYFUS est vraiment gentille. Sa folie n’est pas gênante. D’ailleurs elle est très en forme et déborde d’enthousiasme. Malheureusement, elle a pour « quelqu’un » certain penchant qui me désole.
Pour ne pas te faire languir davantage, je te dirai que François JACOB, alias HERTZ brun, m’inspire une vive sympathie. J’ajouterai que mon amitié est bien placée. Sans parti pris, c’est un chic type.
Le voilà : grand, mince, beau, gai, spirituel, intelligent, bien élevé. Il ignore tout du flirt. On peut parler avec lui sans arrière-pensée. Cela change un peu quand on vient de passer trois semaines avec un Simon NORA. Celui-là, je ne le reverrai pas de sitôt. De toute façon, ne t’inquiète pas. Je suis froide, raisonnable et réservée … hum ! De toute la bande, c’est le HERTZ brun que je préfère, mais quand à « m’étioler » pour un si charmant Adonis … pooh ! A d’autres !
En attendant, mes yeux papillotent et ma main s’alourdit. Ce n’est pas étonnant. Il est maintenant 10H, et je me suis couchée ce matin à 3H ¼ (voir chapitre suivant).
Adoncques bonsoir. Je vais faire de beaux rêves (pas de sous-entendus)
Lundi après –midi
IIIe Chapitre
Faits divers
Vendredi matin, scandale à Etretat.
Un monsieur de mes amis, André MEYER, très frétillant malgré ses quarante ans, s’est mis en tête de me saoûler. J’ai dépassé ses espérances. Il m’a fait boire un cocktail aussi délicieux que perfide. Pour la première fois de ma vie, j’ai été vraiment grise. J’arpentais le casino en titubant, je hélais de vieux inconnus qui me regardaient d’un air effaré. J’ai même présenté Madame Lindon douairière à ma co-saoûl Annette ? O funérailles ! J’avais d’ailleurs l’ivresse très gaie. J’ai dit (paraît-il) les pires folies, sans sortir des limites de la bienséance. Madame André MEYER et ma tante Marie étaient d’ailleurs presqu’aussi grises que moi. En tout cas (paraît-il), j’ai fait rigoler toute la terrasse du casino. André MEYER, de plus en plus excité, m’a emmené déjeuner chez lui avec Annette. Je te prie de croire que cette fois-ci, rien n’a réussi à m’intimider, ni le valet de chambre qui pouffait dans le gigot, ni la nappe de dentelle fine, ni l’amabilité du maître de maison. J’aime mieux celaqu’au dîner chez Madame LINDON mère. L’après-midi, j’ai rencontré des tas de gens qui m’ont demandédemes nouvelles. J’étais fort embarrassée, étant donné que je ne me rappelais même plus les avoir vus le matin pendant mon ivresse. C’est du beau ! Entre parenthèse, j’ai bien juré de ne plus recommencer.
Le lendemain, c’est-à-dire hier soir, j’ai revêtu avec émotion la chère « Deux Mai ». Soirée de gala. J’ai revu « Le Roi » que j’avais déjà vu à Paris c’est [sic !!!] hiver et qui est un film très indécent. N’empêche que j’ai bien reri. Après le film, souper et soirée dansante. J’ai vidé force verre de champagne, en face de Mr TANNERY avec qui je suis du dernier bien. Jacqueline et Nicole n’étaient d’ailleurs pas là. J’ai beaucoup dansé, en particulier avec le HERTZ brun qui ne fait que se lancer. Après, les vieux ayant été se coucher, j’ai vidé chaque fond de verre (même celui de Mr TANNERY, qui était du reste fort plein). Ensuite, j’ai gagné à la loterie une belle poule rose ainsi qu’une bouteille de champagne (ce qui n’est pas à négliger). La noce a continué jusqu’au matin 3H. A laquelle heure ma gente tante m’a pris par la peau du cou pour rentrer à la maison.
Ne me gronde pas, je t’en prie,. C’est si bon de s’amuser. L’année prochaine, je loue une villa à Etretat et je t’invite. J’espère que tes parents te laisseront venir ? C’est si près d’Aubergenville.[1]
Ce matin, il a fait un temps splendide. Je suis restée toute la matinée das l’eau. Nous avons fait un train de périssoires. Il y en avait cinq à la file, plus un bateau à voiles. Je suis rôtie.
Lundi soir : 11H ½
Pooh ! Je suis complètement saoûl. Toutes mes résolutions se sont envolées devant un champagne cocktail. Je reviens de Hollywood, la boïte de nuit d’Etretat. Après une promenade nocturne sur la falaise (en compagnie du HERTZ brun, de LEVY, BLOCH, etc…) nous sommes allés retrouver les parents à Hollywood. Nous avons bu et danser [sic] (especially avec le HERTZ brun). Ventrebleu ! Tout tourne, tout tourne au cabaret ! On a tué la poule. Cot, cot, cot, ça braillait. Boudha ! que j’ai sommeil. Cot, cot, cot !!! Le champagne était bon mais le géranium est cassé. Je ne ferai plus de bicyclette. Ca fait trop mal à Mathurin. Austerlitz, le Multhal, Iena, Auerstaedt, le Landgrafenberg ! Pooh ! Vive les vacances. 1/6 PD3. Boudha ! Tiens ! Les carreaux du plancher sont soudainement inscrits dans des circonférences. Fffff. Je n’en peux plus. Au lit !
[1] En 1935, la mère d’Hélène ne l’avait pas autorisé à aller avec Odile à St Jean de Luz « parce que c’était trop loin »
Lettre à Hélène du 6 septembre 1937
Enveloppe adressée à Mademoiselle H. BERR, « Le Vivier », Aubergenville (Seine-et-Oise)
Le 6 Septembre Villa Maïtena, Côte de Ste Barbe, St Jean de Luz, Basses-Pyrénées
C’est aujourd’hui Rosch-Haschana
Aussi je te souhaite une bonne année avec beaucoup de bonheur. Je suppose que ce n’est pas le jour indiqué pour écrire. Mais t’écrire à toi, c’est plutôt un plaisir qu’un devoir. J’espère que le bon Dieu me pardonnera. D’ailleurs, j’avais réellement besoin de faire un brin de causette avec toi.
Je suis en train de vivre des jours bizarres. Après la féerie étretataise, après cet espèce de tourbillon multicolore, c’est le vide, le noir, le cafard. Je suis comme ivre-morte. Tu ne peux pas savoir à quel point j’ai été malheureuse pendant une semaine. Je ne pouvais pas croire que cela m’arriverait un jour d’être si malheureuse. La réaction était à prévoir après la vie que j’ai menée à Etretat. C’était trop beau pour durer. J’ai pleuré en quittant mes braves galets tout ronds, j’ai pleuré en refermant la porte rouillée de la villa Dorus, j’ai pleuré en faisant mes adieux au HERTZ brun (épisode authentique, difficile à écrire, et qui, j’en ai peur, le sera bien plus à raconter). Résultat : ma famille me porte sur les nerfs ; je les adore tous, mais leur moindre parole me crispe. Ils ont le don de jubiler au moment où j’ai le plus fortement envie de pleurer. Seul François[1] me convient parfaitement. Il a une figure d’enterrement qui répond à mon état d’esprit.
[1] Le frère d’Odile
Lettre à Hélène du 2 septembre 1938
J’ai quitté Étretat lundi après-midi. J’ai rebondi à Paris Mardi, et d’un saut Mercredi, je me suis transportée à St Jean-de-Luz ! Tout cela a été si vite que je n’ai pas eu le temps d’avoir le cafard. D’ailleurs, pourquoi l’aurais-je ? Mon séjour à Étretat s’est fort bien terminé. Pendant la dernière semaine, il a fait un temps magnifique. Les championnats se sont terminés par les victoires respectives de Michel BLOCH, François JACOB, Gérard LÉVY, etc… Jeudi soir, 25 Août, nous avons décidé de partir en pique-nique le lendemain. Quand j’ai annoncé cela à ma tante, elle a pris un air navré. Elle avait invité une trentaine de personnes à goûter et à bridger Vendredi après-midi, et elle comptait sur moi pour l’aider à recevoir. Je lui offrai (sic) à contre-cœur de remettre le pique-nique, ce qu’hélas, elle accepta aussitôt. Je fis part de cette décision le soir à la bande, et je fus accablée de quolibets : « C’est toujours la même histoire avec toi ! Tu mets toujours les bâtons dans les roues ! Tu es une lâcheuse ! ». J’étais déjà assez déçue. Je dus faire un grand effort pour ne pas pleurer. Le lendemain, 26 Août, j’arrive toute fringante au petit déjeuner. On me dit aimablement bonjour, mais personne ne songe à me souhaiter ma fête[1]. Je remonte dans ma chambre, et je me mets à verser des larmes amères sur mes 18 ans. Puis je vais au tennis, et là je reçois un accueil plus chaleureux de mes petits amis, et mes petites amies. Je me sens un peu ragaillardie. Monique GORDON en particulier arrête tous les membres du tennis et leur tient ce discours : « Vous savez, c’est la fête d’Odile. Elle a 18 ans aujourd’hui. Oh vraiment ! Bonne fête, félicitations. » La dite Monique GORDON est une fille adorable. Elle a 14 ans et demi. Elle est très enfant, et elle en a en même temps un air de grande personne. Elle mène la même vie que sa sœur Arlette qui a 18 ans. Elle a un peu la tête de Lisette LÉAUTÉ, mais posée sur un long corps maigre et dégingandé. (Elle est aussi grande que moi). Je suis devenue très amie avec elle.
A midi, sur la terrasse de casino, je tombe dans Madame JACOB qui me prend dans ses bras, et m’embrasse sur les deux joues en me souhaitant ma fête. J’étais très émue. Je suis d’ailleurs au mieux avec elle. Elle m’achète des gâteaux, des bonbons, elle me donne sa veste quand j’ai froid, me félicite quand j’ai bonne mine, me donne des conseils maternels pour grossir. Elle a surtout une manière de dire : « Vous n’avez pas vu François ? Il n’est donc pas avec vous (rare) » ou bien « Ne rentre pas tard François. N’est-ce pas Odile, vous me promettez qu’il sera rentré à 10 H ½ . J’ai confiance en vous. » Dans l’ensemble c’est une très agréable belle-mère.
….
Le lendemain matin je me suis baignée, et l’après-midi nous avons été pêcher la crevette. Nous nous sommes empilés à 6 dans un minuscule tacot, genre Simca et nous sommes partis pêcher à 8 km d’Étretat. Nous avions des touches invraisemblables. En particulier, moi je me pavanais dans une culotte en toile rouge qui appartenait à Jérôme[2] et qui éclatait à l’endroit du poum et des cuisses. HAMLET[3] s’était coiffé de sa casquette d’officier de marine anglais qui n’avait servi que le soir de la revue, mais qui était déjà considérablement déformée, étant en papier. Nous étions 8 en comptant ceux qui étaient venus à bicyclette. En arrivant à l’endroit où l’on devait pêcher nous nous sommes aperçus que si nous avions pris des filets, il nous manquait des paniers pour mettre les crevettes. Nous avons remplacé les paniers pour un vieux chapeau troué, et nous sommes partis sur les rochers. Nous avons pataugé pendant 3H, dans les flaques d’eau et nous avons rapporté une pêche miraculeuse … 33 crevettes ! Inutile de dire que notre pêche fut peu énergique et qu’au bout d’une heure, HAMLET et moi, chaperonnés par Monique, nous nous campâmes sur un rocher et que nous n’en bougeâmes plus jusqu’à l’heure du départ. O shame ! Ne t’offusque pas. Il y a pire.
[1] Odile est née le 26 Août 1920. Odile et Hélène utilisent le mot « fête » pour « anniversaire ».
[2] Jérôme LINDON, son petit cousin, alors âgé de 13 ans.
[3] François JACOB, auparavant surnommé le HERTZ brun, est devenu HAMLET
Lettre à Hélène du 8 septembre 1938
. A propos d’HAMLET, imagine-toi que je ne m’ennuie pas du tout après lui. C’est même très inquiétant. Je crois au fond que c’est parce que j’ai l’impression qu’il est bien amarré maintenant, et que je n’aurai qu’à tirer sur la corde pour le faire venir. C’est aussi parce que j’ai retrouvé ma liberté. Ce monsieur malgré les apparences est très autoritaire, et il a très mauvais caractère. Et moi, qui d’habitude ne peut supporter de recevoir des ordres, je lui obéis comme à mon seigneur et maître (!). Je sais que c’est une très mauvaise méthode, mais je ne peux pas m’en empêcher. Il en profitait si bien que souvent d’autres gueux lui disaient « Tu lui parles comme si tu étais son mari ». Et Odile de rougir jusqu‘aux oreilles. Maintenant je suis de nouveau ma propre maîtresse, ce qui me semble très agréable.
…
. Un de mes oncles Louis BAUR, est en villa à Hendaye. Il a amené avec lui, un de ses beaux-frères : Jacques HYAFFIL[1]. C’est un garçon que je n’avais pas vu depuis 10 ans. Il y a 10 (oubli : ans) j’ai été demoiselle d’honneur avec lui, au mariage d’oncle Louis. A cette époque c’était un agréable petit garçon et j’étais très amoureuse de lui. Maintenant c’est un magnifique garçon de 21 ans remarquablement intelligent. Il fait l’Inspection des Finances ce qui est très dur pour un juif[2], et il est tellement brillant que ses professeurs disent eux-mêmes qu’ils en sont émerveillés. Il est charmant, déteste le milieu de Marie HARBLEY et de Maurice HAHN. Il est blond-châtain avec des yeux très clairs, et malgré tout il a un charme très oriental. Voilà. J’avais hâte de te mettre au courant. Ce garçon me plait énormément et je crois que je ne lui suis pas antipathique. Naturellement j’aime mieux HAMLET, mais j’ai l’impression que s’il n’y avait pas HAMLET, ce serait Lui. Ne te lamente pas, et ne murmure pas d’un air coléreux : « Quelle fille frivole ! » Aie pitié de mes dix-huit ans.
Lettre à Hélène du 22 septembre 1938
Il fait depuis quelques jours un temps magnifique. Les bains sont merveilleux. Depuis plus d’une semaine J.H. vient régulièrement tous les jours. Dire qu’on a tout pour être heureux et qu’on ne peut pas l’être. A propos de J.H., je suis hélas, de plus en plus emballée. Je suis même obligée d’avouer qu’il est mieux qu’Hamlet. Il est beaucoup plus fin, beaucoup plus cultivé, beaucoup plus musicien. Il est bon, complaisant, et n’a pas ce défaut que j’ai malheureusement découvert à Hamlet cet été : l’égoïsme. Il est d’une franchise quelquefois déconcertante. Malgré tout, j’aime toujours mieux Hamlet. Je crois que c’est par habitude, et qu’il en faudrait peu, pour que cette habitude passe. L’autre jour J.H. ayant eu le malheur d’être un peu plus chaleureux que de coutume, j’ai failli perdre la tête. Il est heureux qu’il parte au service cette année, car ainsi, il y a des chances pour que les beaux yeux noirs d’HAMLET ne versent pas de larmes.
…
François mon frère arrive ce soir. (On ne l’appelle plus autrement dans la famille, pour le distinguer de François pas mon frère[3]).
Lettre à Hélène du 7 avril 1939
Lundi, j’ai été au cinéma de nouveau avec HAMLET[4] et son ami Gérard LÉVY. J’ai vu Pygmalion. C’est vraiment épatant. Après, j’ai été au temple[5] avec HAMLET. Le soir, Seder[6] chez Grand Maman[7]. Nous étions trente, car beaucoup de petits cousins y assistaient cette année. Ce fut très gai. . Mais j’étais tellement enrhumée et fatiguée que je n’en ai pas profité. Mardi matin, je suis retournée au temple et Mardi après-midi, je suis ressortie avec J.H.[8] Il était tellement adorable que j’avais envie de pleurer. Je suis presque décidée[9]. Mais en même temps je suis très malheureuse …
Lettre à Hélène du 15 août 1939
Depuis mon arrivée ici[10] d’ailleurs, nous n’avons pas cessé d’être ensemble[11]. Je le rencontre le matin au tennis, nous allons ensemble à la plage, nous nous baignons de compagnie, nous nous séchons côte à côte. Au déjeuner : séparation. Mais à 2H nous nous retrouvons au casino pour répéter notre numéro. Après la répétition, nous allons généralement nous promener avec le reste de la bande. Nous goûtons. Vers 7H, nous plaquons le reste de la bande, nous faisons une petite promenade solitaire, mais du tout sentimentale. Il me raccompagne Villa DORUS, et nous nous séparons pour dîner. Après le dîner, nous nous retrouvons au casino. Nous dansons. Sur 10 danses, j’en danse huit avec lui, une avec Henri DUIZEND et une avec un gueux sans importance. Aussi les vieilles dames me lorgnent-elles d’un air désapprobateur derrière leur face à mai,. Tout Étretat sait à quoi s’en tenir, ou plutôt croit savoir à quoi s’en tenir. Mais la conduite d’HAMLET ne répond certainement pas à l’idée qu’ils s’en font (« ils » représente les gens d’Étretat). On raconte certainement beaucoup de mensonges sur notre compte, mais je m’en fiche totalement.
Lettre à Hélène du 23 août 1939
Pouah ! Quel sale temps ! C’est à fuir !
La fenêtre pleure à chaude larme et j’ai envie d’en faire autant. La fête est finie maintenant. Je me suis amusée comme une folle Samedi soir. Il faut que je te décrive cette soirée. D’abord, toute la journée de Samedi s’est passée en ultimes répétitions.. Naturellement, cela marchait plus mal que jamais. Les filles levaient les jambes à contre-temps, les garçons chantaient faux. Quand il fallait regagner les coulisses, à la fin, moi qui étais la dernière, j’arrivais toujours trop tard. Aussi mes petits pas mignons devenaient-ils des enjambées de 7 lieues, ce qui exaspérait notre metteur en scène. A 5H du soir, la panique avait atteint son maximum. Les autres numéros marchaient encore plus mal que le nôtre. Les grenadiers en herbe ne savaient plus marcher au pas. Ils partaient du pied droit quand il fallait partir du pied gauche. A 7H ½ , nous avons dîné la gorge serrée et les jambes tremblantes. Après le dîner, le maire[12] alla endosser son smoking, la mairesse sa robe du soir, Denis et Laurent, leurs costumes de Grenadier, Jérôme, celui du David Copperfield qui lui allait à ravir, et moi mon costume de Niçoise. Le-dit costume se composait d’une jupe très courte à rayures blanches et rouges, d’une blouse blanche à manches bouffantes, d’un corselet de velours noir, d’un fichu rouge et d’un tablier de dentelle noire. Sur la tête, un chapeau niçois. Me voilà.
Nous étions 8 filles habillées de la même façon. C’était très joli de nous voir rentrer toutes le 8 à la file. Les garçons étaient en officiers de marine anglais. Ils avaient l’uniforme blanc avec boutons et galons dorés. Imagine-toi HAMLET dans cet uniforme. Il était inouï ! Quel dommage qu’il fasse sa médecine ![1]
…
Après, les 16 boys and girls ont été invités à souper par Maxime LINDON, frère de Raymond, et qui avait contribué à organiser notre numéro. Je ne me suis jamais autant amusée à un souper, même chez les RAYNAL. Je n’ai pas bu beaucoup de champagne, mais j’étais saoûle de joie … et je crois qu’HAMLET en a un peu profité. A 3H je suis rentrée me coucher et j’ai dormi comme une marmotte jusqu’à 9 H.
Dimanche, j’ai passé la journée avec Papa et Maman qui étaient arrivés Samedi. Ils sont repartis Dimanche soir. Ce matin, j’ai été voir les championnats de tennis. C’est passionnant. Il y a d’excellents joueurs, en particulier HAMLET. IL a un style magnifique et un jeu très varié. Pour l’instant, il n’est pas encore éliminé, mais je ne pense pas qu’il puisse gagner le championnat, car il y a de véritables champions qui sont venus du Havre. Les dénommés Gérard LÉVY et Michel BLOCH sont là. Ils sont très gentils. Cette après-midi, comme il pleuvait à torrent, nous nous sommes tous réunis dans la villa d’une fille de la bande. Nous étions au moins 30. Nous avons dansé, mangé, joué au billard. La pauvre Jeanine ne se sent pas très à son aise dans ce milieu d’excités. D’ailleurs, la plupart du temps nous nous promenons solitairement, moi, HAMLET, elle, LÉVY et BLOCH. Thérèse WEILL trotte souvent derrière nous. Elle exaspère François. Il y a une jeune fille au tennis qui s’appelle Mademoiselle HAMLET. Chaque fois que François me parle d’elle, j’ai une crise de fou rire.
Je ne sais plus quoi penser d’HAMLET. IL est à la fois plus et moins chaud. Par exemple, quand je disparais, il se lance éploré à ma poursuite, et quand je suis avec lui, il n’arrête pas de se payer ma tête, et de se moquer de tout ce que je dis. Je crois qu’il me trouve bête. Ceci dans la journée. Au contraire, le soir, il est plus que tendre (ne laisse pas ton imagination battre la campagne ; tout est relatif). Que penser de cette attitude. Je voudrais savoir ton opinion.
[1] Odile trouve que le sérieux avec lequel François JACOB étudie l’empêchent de s’occuper suffisamment d’elle. C’est une des raisons pour lequel elle se détourne de lui. L’autre étant qu’elle n’aime pas être dominée, et que Jacques HYAFIL, d’un caractère aimable, fait ses quatre volontés.
[1] L’orthographe véritable est HYAFIL, originellement YAFFI. Le nom veut dire en hébreu « le beau », et en arabe « celui qui vient de Jaffa ». La famille HYAFIL, originaire d’Algérie, s’est implantée en France avant la Première Guerre Mondiale. Le nom El YAFFI est encore répandu aujourd’hui au Moyen-Orient, où il dénote une appartenance tribale.
[2] Jacques HYAFIL prépare le concours de l’Inspection des Finances. Il n’y sera jamais admis, peut-être effectivement à cause de ses origines juives. La création de l’Ecole Nationale d’Administration (ENA) en 1945 avait notamment pour objectif de supprimer le système de cooptation largement fondés sur l’origine sociale qui prévalait dans les grands corps de l’Etat.
[3] Càd François JACOB, que les parents d’Odile considéraient comme un probable futur gendre.
[4] François JACOB.
[5] La synagogue.
[6] Dîner de la Pâque Juive (la Cène était un Seder).
[7] – Rachel BAUR, la grand-mère maternelle d’Odile.
[8] Jacques HYAFIL.
[9] A abandonner François JACOB pour Jacques HYAFIL.
[10] À Étretat
[11] Avec François Jacob
[12] ON Raymond LINDON, l’oncle d’Odile chez qui elle habite à Etretat. La mairesse est Thérèse LINDON, la tante maternelle d’Odile, et Jérôme, Laurent et Denis sont les enfants du couple LINDON.
Lettre à Hélène du 28 août 1939 (après la mobilisation générale)
HAMLET est parti hier à Paris. Son attitude envers moi n’a pas changé. Mais j’ai décidé de ne rien lui dire[1]. Ce n’est pas la peine de lui faire de la peine en ce moment, d’autant plus qu’on ne sait pas comment les choses vont tourner. Il sera toujours temps cet hiver. Je suis un peu triste qu’il soit parti, car il exerçait sur moi un effet calmant. D’autre part, cela me distrayait d’être avec lui. Maintenant, je ne veux plus voir personne.
Lettre à Hélène du 28 juillet 1940
.J’ai reçu il y a quelques jours une lettre du père d’HAMLET. J’avais écrit à HAMLET vers le 10 Juin, parce que j’avais appris la mort de sa mère. Son père me répond que ma lettre vient seulement de lui parvenir à Vichy, et qu’il veut me remercier à la place de François dont il n’a pas de nouvelles depuis le 17 Juin. Il l’avait fait quitter Vichy à cette date à cause de l’avance allemande et l’avait envoyé avec des camarades du côté d’Arcachon. Depuis, il n’en a pas entendu parler. Je me demande quel coup de tête HAMLET a pu faire. Peut-être est-il là où je croyais Jacquot ![2] Il a dû faire n’importe quoi sans réfléchir, surtout lui qui est enclin aux idées noires, et qui devait être bouleversé par la mort de sa mère qu’il adorait. [3]Et ses études qu’il avait fait passer avant tout (si bien que …) et qui sont maintenant fort compromises. Je me rends compte que j’ai beaucoup de peine pour lui, et que j’aimerais bien qu’on ait de ses nouvelles. Il a tellement compté pour moi pendant quelque temps, ce pauvre H. (ö cahiers de philo !) En tout cas, j’étais rudement émue et intimidée même de voir une lettre de son père s’épanchant en moi. Pauvre homme Il a tous les malheurs à la fois.
Lettre à Hélène du 6 août 1940
Mon autre cause de soucis est HAMLET. Décidément, ils m’auront fait faire des cheveux blancs ces deux-là ! Non, je ne veux pas plaisanter. Je t’ai déjà parlé d’HAMLET dans une de mes lettres, mais je n’étais pas alors aussi troublée que maintenant. On est toujours sans nouvelles de lui, et sa disparition est toujours mystérieuse. C’est par une lettre de Madame P. NATHAN[4] que nous avons eu de nouveaux détails. Tu sais qu’il était parti de Vichy avec deux camarades et notre ami Michel B.[5] Au début de mon séjour ici, j’ai reçu une carte de Michel qui se trouvait être à Pau, et qui me demandait avec insistance si je n’avais pas rencontré François qu’il avait dû quitter à Dax et qui devait errer dans ma région avec ses deux camarades. Il avait l’air inquiet à son sujet. Moi je n’y ai pas attaché d’importance. Plus tard, j’ai reçu une lettre du père d’HAMLET qui avait l’air si malheureux que cela m’a remuée jusqu’au fond du cœur. Et puis maintenant cette lettre de Mme NATHAN, qui nous dit que François a quitté également ses deux camarades après le départ de Michel, sans faire part de ses intentions, et que depuis, on ne sait pas ce qu’il est devenu. Elle s’étend, s’étale, dramatise, et se gargarise. C’est très méchant. Elle fait des grandes phrases disant qu’on ne peut même pas savoir « s’il est encore en vie, étant donné que tous les liens qui le retenaient avaient été brisés[6] ». Elle n’avait vraiment pas besoin de raconter tout cela, car elle savait bien que cela me ferait de la peine. Tu ne peux pas savoir le chagrin que j’ai lorsque je pense aux deux années à Étretat, aux lettres-feux d’artifice que j’écrivais à cause de lui[7]. Et j’ai tellement de peine pour son père qui n’avait vraiment pas besoin d’un coup comme celui-là après avoir perdu sa femme. Comme je voudrais qu’on ait de ses nouvelles. Parce qu’au fond, tel que je le connais, ça m’étonnerait beaucoup qu’il soit passé chez les amis de BÉNASSY. [8][9]
[1] Cela semble indiquer qu’Odile a définitivement fait son choix en faveur de Jacques HYAFIL
[2] Odile n’a pas de nouvelles de Jacques HYAFIL, avec qui elle devait se marier le 16 mai 1940 , mariage repoussé à cause de l’offensive allemande du 10 mai. Elle ne sait pas s’il est vivant ou mort, libre ou prisonnier. Elle redoute ( !) qu’il soit en Angleterre. Angoisse de la séparation. Jacquot est en fait prisonnier, et la séparation durera 5 ans.
[3] François JACOB s’est effectivement embarqué pour l’Angleterre le 21 juin 1940 à Saint Jean de Luz, où il ignorait qu’Odile était réfugiée. De là, il a rejoint la France Libre. Il fera la guerre avec la 2ème D.B. du Général LECLERC (comme Marc HYAFIL, le frère de Jacquot)
[4] Fernande NATHAN, l’épouse de l’éditeur Pierre NATHAN (fils de Fernand NATHAN) qui sont des amis proches des parents d’Odile.
[5] Michel BLOCH, ami de François JACOB, à qui il disputait le titre de vainqueur du championnat de tennis à Etretat.
[6] C’est la première indication formelle dans une lettre d’Odile qu’elle a informé François JACOB de ses fiançailles avec Jacques HYAFIL. Même s’il eût été étonnant qu’elle ne l’eût pas fait.
[7] Plus particulièrement sa lettre à Hélène du 24 Août 1937.
[8] C.à.d. les Anglais
[9] Et pourtant si ! Le 17 Juin, jour de ses 20 ans – et de la demande d’armistice du Maréchal Pétain, François JACOB est à Arcachon chez son oncle Henri, qui lui conseille de gagner l’Angleterre plutôt que l’Afrique du Nord. Le 21 Juin, il est à Saint-Jean de Luz (!) où il s’embarque sur le S.S Batory, qui emmène Outre-Manche les restes de deux divisions polonaises ayant combattu en France. (François JACOB, La Statue Intérieure, Ed. Odile JACOB 1987, pp. 119-120).
SEPTEMBRE 1944
François JACOB est au VAL DE GRACE « cloué sur son lit comme un hanneton sur le dos [ …] le bras droit et tout le thorax emprisonnés dans un plâtre, la jambe droite et le bassin dans un autre.
Lettre d’Odile à Annette DREYFUS – BENACERRAF du 15 avril 1945[1]
[1] Reproduite dans : Annette DREYFUS-BENACERRAF, L’Odyssée d’une Jeune Fille de Bonne Famille, Paris 1940 – Stockholm 1980, Éditions Tirésias 1997. Si Odile n’a pas épousé François JACOB, Prix Nobel de Médecine en 1965 (l’année de la mort d’Odile), Annette DREYFUS, l’une de ses grandes amies, a épousé Baruch BÉNACERRAF, Prix Nobel de Médecine en 1980. Quant à Hélène BERR, la sœur de cœur d’Odile, elle jouait au tennis à Aubergenville avec Jacques MONOD, Prix Nobel de Médecine en même temps que François JACOB ….
Epilogue par le fils aîné d’Odile
En 1957 ou 1958, alors que j’étais âgé de 10-11 ans, Odile et Jacques HYAFIL recevaient François et Lise JACOB (que ma mère aimait beaucoup) à dîner. Pour une raison que j’ignore, l’après-midi, ma mère a éprouvé le besoin de me dire, à propos de François JACOB :
- Tu sais, c’est quelqu’un qui m’a beaucoup aimé.
- Mais toi, tu n’as aimé que Papa !
Et Odile, songeuse :
- Dans la vie on peut aimer plusieurs personnes.
Le petit garçon a été si bouleversé par cette révélation que l’homme de 75 ans s’en souvient encor …