En juin 1935, Raymond et Antoinette BERR, les parents d’Hélène, donnent dans leur propriété d’Aubergenville, Le Vivier, une réception qui compte plus de 200 personnes.

C’est le premier bal d’Hélène et d’Odile. Elles ont 14 ns, et c’est à titre exceptionnel qu’Odile est invitée. Pas en dessous de 18 ans disent la mère et les sœurs d’Hélène.

L’évènement marquera les deux jeunes filles. Elles le décriront dans un journal à 4 mains sous le titre de la G.P. Le manuscrit est déposé au mémorial de la Shoah, Fonds Mariette Job. La G.P. est fréquemment évoquée dans leur correspondance, de même que l’Invitation à la Valse de Strauss, qu’Odile joue au piano, et qui est associée à cette garden-party.

Un dessin tiré d’un carnet de cours d’Odile illustre cette Garden Party. Hélène et Odile sont en bas à gauche.

La Garden Party illustrée par Odile

Des extraits de ce journal à 4 mains figurent ci-dessous. Les parties écrites par Odile figurent en intégralité. Celles écrites par Hélène font l’objet d’un bref résumé avec quelques citations.

Hélène :

Hélène évoque la décision de son père de lancer une grande invitation à Aubergenville.

« C’est l’origine de la Garden Party, l’unique de ce nom, la première fois où je me suis vraiment bien amusée, journée enivrante dont, chose curieuse, chque détail est resté gravé dans mon umagination comme les jours d’un calendrier. »

[…]

« Plus que deux semaines ! – Mon Dieu, je ne travaille pas […] Dieu que je suis heureuse ! Et puis je vais avoir une jolie robe.

[…]

Odile :

Hélène :

« C’est demain ! […] La tente est montée. […] Pourtant je ne suis qu’une petite fille. Cette pensée là rabat tout mon enthousiasme. Pourquoi ? Au fond, amusons nous tant que nous pouvons. … »

Odile :

Hélène :

Samedi soir : Hélène n’arrive pas à s’endormir et sollicite sans arrêt Nicole, sa cousine. Puis enfin : « Je commence à somnoler. Tout s’efface peu à peu, au lointain, des formes légères, impalpables, dansent sur un rayon de lune blanc qui se reflète sur le canal. Il me semble entendre les notes pures d’un nocturne de Chopin »

[…].

« Dimanche matin […] Le jardin est inondé de soleil, les oiseaux gazouillent à qui mieux-mieux, et le jardin de curé entouré de roses. […] Tout respire la joie. »

Odile :

Hélène :

Les invités devraient arriver à partir de 4h. En attendant, Hélène et sa famille déjeunent gaiement dans une salle à manger « inondée de lumière ». À 2h ½, déjà, « Le buffet étincelle du cristal des coupes à champagne  [Il] s’allonge sous les marronniers touffus, et derrière les tables de souper avec leurs nappes blanches sont déjà là». *

Odile :

Hélène :

À Aubergenville, plus qu’1/2 heure. Il faut s’habiller. » Enfin je peux glisser mon long dessous en taffetas blanc … C’est amusant, ça fait frou-frou quand je marche. Ma robe est là sur le lit, elle est ravissante, vaporeuse. Tout ce que je voulais. »

[…]

« Maintenant je suis prise d’une crise de timidité folle. J’ai peur que quelqu’un n’arrive. »

Quelqu’un arrive et Hélène est invitée à danser. « Dès lors ma timidité fond. […] Et puis voilà Odile. Oh ! comme elle est jolie. Sa robe est comme ses yeux que les longs cils noirs abritent, un peu intimidés. »

Odile :

Hélène:

Un grand polytechnicien emmène Hélène «  au son des valses effrénées »

Odile:

Hélène :

Un attroupement se fait devant un dessin d’Hélène. « Quand on demande l’auteur du tableau, je file avec Odile. Je cours dans l’herbe haute. La source jase toujours avec un bruit argentin. Elle parle au coucou. »

Odile :

Hélène :

Hélène participe une farandole avec Odile et sa sœur Yvonne. « C’est merveilleux, les robes longues et les cheveux rejetés en arrière par la brise, nous courons, nous courons. » On dirait « un tableau de Botticelli ».[…]

« Le soleil descend ; l’eau a des reflets tout roses. Je suis sur la pelouse avec Odile. »

Odile :

Hélène :

C’est l’heure du souper. « Nous dévalons la pente à toute vitesse. Ma robe est en loques. […] Le soleil est maintenant gris-mauve avec des couleurs orange du côté où (il) s’est couché. »

[…]

« Il fait sombre maintenant. Tout d’un coup des projecteurs s’allument, salués par une ovation gigantesque »

Odile :

Hélène :

Le dîner s’achève. C’est le moment des discours. Certains jeunes sont un peu éméchés.

« Dans le bois c’est très drôle. On rencontre des groupes. Seules les robes claires font des taches dans la nuit bleu foncé. »

Odile :

Hélène :

Il est 10h du soir. Les gens commencent à partir, mais Hélène est sans arrêt invitée à danser.

« je n’entends plus que la musique. Je me laisse aller complètement. Pff ! tout tourne. […] Tout le monde part déjà. Mon Odile s’en va. (…] Tant pis, je veux m’en donner à cœur joie pour la fin. Je danse, je parle, je parle beaucoup trop. »

[…]

« C’est fini, bien fini. La famille est là dans le jardin. La lutte commence à se lever et se reflète dans un clapotis d’argent sur l’eau que le vent ride. » Puis il faut aller se coucher. « Tout s’apaise. De mon rêve agité je glisse doucement dans un profond sommeil.

C’est fini ! Bien fini ……. »